samedi 5 septembre 2009

MA CORRESPONDANCE AVEC ANNE-CHARLOTTE (13)

7ème email d'Anne-Charlotte
10 févr. 2006 15:30
Re: Lettre du 10 février

Ma chère Mauricette
Je devais vous réécrire un mail dans le jour suivant mon dernier mail. Mais, je n'ai pas eu le courage de vous écrire, ce n'est pas que je suis paresseuse mais le coeur y manquait. Vous savez, j'ai souvent mal au coeur. Ce n'est pas la crise cardiaque qui m'attend, mais le mal de vivre. Je le sais maintenant que nous avons lu "le bateau ivre" en cours de français. Je suis en terminale et je prends encore des cours de français... c'est parce que j'ai complètement raté mon bac français l'an dernier... j'ai eu le blocage du crayon, impossible d'écrire une ligne... résultat, moi qui étais une des plus brillantes de ma classe, je me retrouve à la traîne, pour le plaisir de certaines... j'ai appris dernièrement que mes mauvaises notes encourageaient les langues de vipère à dire du mal de moi... en tout cas, je recommence l'option français cette année... je disais donc, j'ai le mal de mer sur le bateau... et je me préoccupe de beaucoup de choses trop lourdes dans la famille... moi aussi, comme vous, j'aimerais être en foyer et ne plus avoir à penser à mes parents, ma petite soeur, mes vacances dans le domaine familial avec tous ces gens que je déteste... je n'ai pas l'impression de grandir mais d'être née grande, adulte, vieille... quand je découvre votre jeunesse, vos parties de plaisir avec tous ces jeunes gens, bien foutus, avec qui vous avez fabriqué vos souvenirs, je vous jalouse... vous avez dû en serrer des coeurs dans vos bras, vous avez dû partager bien des choses au milieu de ce beau monde... Moi, je suis un être solitaire, et je ne veux pas réfléchir à mon avenir.
Je ne me suis jamais bourrée la gueule... j'aimerais tournoyer en l'air... et perdre d'un coup ma virginité qui le plombe...
Je vous aime, Mauricette, je vous aime parce que vous êtes différente, vous ne ressemblez qu'à vous même...
Moi, j'essaie d'être comme tout le monde pour passer inaperçue... je vous l'ai dit, je voudrais vivre avec vous dans votre foyer...
gros bisous

votre anne-charlotte

4 commentaires:

lise a dit…

Aye et aouch, Mauricette, mon amie, il faut vite consoler cette petite aux prises avec ses fantômes. Lui dire qu'elle n'est pas la seule. Que nous en avons tous. Que nous sommes toutes ( nous, les femmes surtout) les cibles favorites de tout ce qui peut faire mal, au corps, à l'âme, à l'esprit. Que nous sommes fortes, heureusement, et qu'ensemble nous résistons ( ce n'est pas un appel aux armes citoyennes, mais presque ).
Donnez-lui le grand bonjour de ma part, sêchez ses larmes, et poussez là droit devant par les épaules sur la route tortueuse de la vie. Cahin-cahan, elle arrivera au bout, un jour, comme vous et moi. Faut pas se retourner, sous peine, vous le savez, statue de sel and so on.

Amicalement from New-York, and have a great sunday

Lise
_______

ps : cette correspondance est de mieux en mieux, Bravo !

L'affabulette a dit…

Bonjour Mauricette,
Comme je vous l'ai dit, j'aime beaucoup ce que vous faites. Il y a grande jeunesse en vous, de la fraîcheur compaciblante et donc précieuse. Je m'insurgerai toujours contre ceux qui vous poussent soit vers le tombeau, soit vers l'asile.
Moi, je vous porterai presque tous les jours un pot de lait et une tarte aux cerises. Et si le loup vient à frapper, je suis prête à sortir une escopette de luxe : j'en possède deux !
Votre dévouée Martine

Mauricette Beaussart a dit…

Chère Lise, oui, c'était de mieux en mieux, mais comme vous le verrez depuis le Nouveau Monde, le fil s'est rompu et mon Ari Anne est devenue fille de Loth (Anne-Char Loth !)...
J'ai passé un bon dimanche loin de la braderie sans trop d'aoûtats dans le jardin.

Mauricette Beaussart a dit…

Chère Martine. Votre enthousiasme est unique. Ma mère me disait la même chose mais elle mourut dans mon bas âge.
Vous savez, j'ai eu le droit d'asile pour être soignée et les braves gens de la santé mentale m'ont réparée sans me faire de mal. J'en suis heureuse. Pour le tombeau, c'est différent. J'hésite encore à faire graver mon nom avec de l'avance.
J'ai visité votre affabulette. Elle est vive et pétillante, sans trop de faux plis, ni grumeaux. Je m'en reprendrai de temps en temps.